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Les Meilleurs Films de 2024 – Ecran Large

Par La rédac
24 décembre 2024
MAJ : 28 décembre 2024
© Canva A24, Warner, Mubi Neon

Le Top 25 des meilleurs films de 2024 selon Écran Large, avec du grand spectacle, de l’animation, des larmes, de la folie et beaucoup de cinéma.

Entre les retours de grands noms du 7e art (Miller, Zemeckis, Lanthimos, Audiard, Hamaguchi, Eastwood, Haynes, Coppola, Burton, Mann), la confirmation de jeunes cinéastes (Fargeat, Kapadia, Plante, Zilbalodis) ou la découverte de jeunes talents (Blanchart, Courvoisier, Millet, Donaldson, ), 2024 a été enrichissante et fascinante.

Établir un classement n’a donc pas été simple, l’équipe a hurlé, pleuré, frappé, râlé et finalement voté pour sélectionner les 25 meilleurs films de 2024, que ce soit au cinéma, en VOD ou streaming, célébrant à la fois la richesse de l’année, les coups de cœur de la rédaction d’Ecran Large et sa diversité d’opinion.

NB : Ce top 25 a été constitué par un système de points et d’occurrences grâce aux tops individuels des rédacteurs les plus éminents de la rédaction : Judith Beauvallet, Geoffrey Crété, Antoine Desrues, Mathieu Jaborska, Alexandre Janowiak et Déborah Lechner.

25. caligula – the ultimate cut

  • Sortie : 19 juin 2024
  • Durée : 2h58
Malcom McDowell, après Orange Mécanique

De quoi ça parle : Des frasques (pour rester poli) de l’empereur Caligula, de sa relation avec sa sœur (pour rester prude) et avec sa cour (pour rester décent), au cœur d’une Rome mouvementée (pour rester pudique).

Pourquoi c’est un chef-d’œuvre de sexe et de chair : Cette dernière place est en réalité le résultat d’un compromis entre la rédaction d’Ecran Large et l’auteur de ces lignes. Ce dernier considère l’Ultimate Cut de Caligula comme un long-métrage inédit plutôt qu’une ressortie, les films de patrimoine n’étant généralement pas comptés dans nos tops. En effet, cette version ne comporte absolument aucun plan original du chef-d’œuvre décadent et malade de Tinto Brass. Le documentariste Thomas Negovan a retrouvé 96 heures de rushes et a composé une œuvre entièrement originale, ce qui en fait donc l’un des meilleurs films sortis cette année.

Complètement remonté et purgé de ses inserts pornos les plus racoleurs, Caligula est plus resplendissant et transgressif que jamais. Pour rappel, cette superproduction érotique commandée par un magnat du X est le résultat d’une baston artistique homérique entre plusieurs démiurges mégalos. Il en reste la description encore inégalée d’un pouvoir si immense qu’il finit par corrompre et souiller tout ce qui l’environne. Tandis que les tableaux orgiaques dantesques se succèdent, Caligula devient l’antagoniste ultime d’une société humaine qui, à force de hiérarchiser, a fini par fabriquer un monstre agissant contre sa propre nature. Légendaire.

Ça te plaira si t’aimes : Les Diables de Ken Russell (le double programme ultime)

24. iron claw

  • Sortie : 24 janvier 2024
  • Durée : 2h13
Zac Efronté

De quoi ça parle : De l’histoire des Von Erich (de leur vrai nom Adkisson), une famille de catcheurs que le patriarche tyrannique , Fritz Von Erich, va progressivement mener à sa perte.

Pourquoi c’est à ne pas rater : Après The Nest et Martha Marcy May Marlene, le réalisateu Sean Durkin a continué son étude de l’emprise et de la manipulation avec le somptueux Iron Claw. Le film raconte ainsi la vraie histoire d’une fausse malédiction : celle lancée par un patriarche sur toute sa famille qui se meurt lentement sous sa coupe tyrannique. Le déroulé programmatique redouté se transforme ainsi en un bel exercice narratif, qui prend la forme d’un piège qui se referme brutalement sur des protagonistes condamnés dès la scène d’introduction.

En parallèle de la descente aux enfers des Von Erich (et de leur mère), le film s’intéresse à l’émancipation et à l’épanouissement de Kevin, ainé malgré lui de la fratrie qui lutte contre un destin dont il ne veut pas et un virilisme mortifère hérité de son père. Ce personnage pathétique et profondément touchant est l’occasion pour Zac Efron d’offrir sa plus belle performance, aussi bien dans la pure démonstration physique que la pudeur émotionnelle, avant de tout laisser déborder dans un final volontairement tire-larmes.

Il faut aussi noter la beauté plastique du film, qu’il s’agisse de sa mise en scène affûtée, de ses compositions éloquantes ou de la photographie sublime de Mátyás Erdély qui reste le fidèle collaborateur de Durkin. Dernier argument, et non des moindres : le casting renversant composé de Jeremy Allen White, Harris Dickinson, Holt McCallany, Maura Tierney ou encore Lily James.

Ça te plaira si t’aimes : le catch, The Wrestler, Fighter

23. memory

  • Sortie : 29 mai 2024
  • Durée : 1h40
memory Jessica Chastain, Peter Sarsgaard
Une superbe scène qui a été improvisée sur le tournage

De quoi ça parle : De Sylvia, une mère célibataire qui n’arrive pas à oublier le é à cause de traumatismes enfouis, et de Saul, qui n’arrive pas à se souvenir du présent à cause d’une forme précoce de démence. Après s’être croisés par hasard, ils vont peu à peu se rapprocher, et essayer de s’entraider.

Pourquoi c’est à ne pas rater : Ne vous fiez pas à ses airs de mélo romantique aux grosses ficelles. Memory est au contraire un film d’une infinie délicatesse et finesse, où le réalisateur et scénariste Michel Franco (Después de Lucía, Sundown) filme la rencontre entre deux êtres cabossés, au seul moment où ils pouvaient réellement se croiser, un peu comme un Benjamin Button mémoriel.

À distance, Michel Franco laisse d’abord planer les doutes dans une première partie saisissante, qui culmine dans un face-à-face terrible où le film aurait pu bifurquer. Memory est finalement une bombe à retardement et la déflagration aura lieu plus tard, dans une autre confrontation tétanisante. Le très bon Peter Sarsgaard a reçu un Prix d’interprétation à Venise, mais Jessica Chastain le méritait tout autant avec cette interprétation d’une justesse remarquable, qui repose sur les silences avant d’en arriver aux larmes. Assurément l’un de ses plus beaux rôles.

Ça te plaira si t’aimes : Se souvenirs des belles choses, Away From Her

22. vampire humaniste cherche suicidaire consentant

  • Sortie : 20 mars 2024
  • Durée : 1h30
Sara Montpetit deviendra grande

De quoi ça parle : Sasha n’est pas une vampire comme les autres : elle est trop compatissante pour mordre des humains. Alors que ses parents lui coupent les vivres, elle fait la rencontre de Paul, un ado suicidaire prêt à s’offrir à elle.

Pourquoi c’est à ne pas rater : Au-delà d’avoir le meilleur titre de l’année, Vampire humaniste cherche suicidaire consentant est de ces films dont on jalouse l’ingéniosité du concept. Sa déconstruction du mythe vampirique au service d’un teen movie dépressif fait que chaque dialogue s’amuse de parallèles hilarants, en détournant la toute-puissance inquiétante du vampire en symptômes des troubles adolescents (à commencer par la sexualité, mais aussi un rapport au morbide très contemporain).

Pour autant, le premier long-métrage d’Ariane Louis-Seize dée largement l’amusement initial de ce décalage. La mélancolie de Sasha ne concerne pas seulement sa nature inextricable, mais aussi la désuétude mythologique de ce qu’elle représente. Que nous raconte le vampire, maintenant que cette figure de l’altérité, de la périphérie, a pleinement trouvé sa place dans notre monde ? Sasha a surtout peur du rendement tout capitaliste que demande son quotidien, et se rend compte qu’elle est prisonnière d’une société sur laquelle elle n’a aucun impact. Ce désespoir de toute une génération, la réalisatrice le capte avec une incroyable douceur, qui doit autant à la sensibilité de sa mise en scène qu’au talent de son duo d’acteurs : Sara Montpetit et Félix-Antoine Bénard.

Ça te plaira si t’aimes : Vampires en toute intimité, Twilight, Morse

19 ex-aequo. shin godzilla

  • Sortie : 1er janvier 2024 (sur FILMO)
  • Durée : 2h00
SHin Godzilla
Vamos a la playa

De quoi ça parle : des ravages causés par l’apparition d’un monstre au Japon, ainsi que des efforts pour le vaincre, alors que ses évolutions successives le rendent de plus en plus coriace.

Pourquoi c’est à ne pas rater : Les règles sont les règles : même s’il est sorti au Japon et aux États-Unis en 2016, c’est bien tout début 2024, sur Filmo et en Blu-ray chez Spectrum, que l’avant-dernier volet de la saga Tōhō est parvenu en . C’était un monument de pop culture à l’époque, et le temps n’a fait que souligner sa singularité. Depuis est sorti Minus One, qui a remporté un succès encore plus franc et surtout plus mondialisé. Beaucoup y ont vu un contrepied du film de Hideaki Anno et Shinji Higuchi.

Et en effet, tout les oppose : le grand spectacle touchant a succédé au cauchemar kafkaïen, la tradition du Kaijū eiga aux expérimentations mutantes de l’auteur de Neon Genesis Evangelion, l’ode démocratique post-Hiroshima au cynisme militariste post-Fukushima. Shin Godzilla est incontestablement plus exigeant, voire mal-aimable. Mais en enchainant les angles tortueux, les discussions istratives et l’armement-porn jusqu’à la nausée, il encapsule, comme ont toujours sur faire les aventures du roi des monstres, un mal-être social bien précis.

Et puis, entre-temps, il déchaine l’apocalypse lors de séquences de destruction quasi-métaphysiques, qui placent la mutation permanente de Big G entre la divinité et l’humanité dégénérée, entre l’horreur et le grandiose lors d’une séquence de souffle atomique à jamais au panthéon du Kaijū eiga.

Ça te plaira si t’aimes : les gros monstres, remplir ta fiche d’impôts

19 ex-aequo. sky dome 2123

  • Sortie : 24 avril 2024
  • Durée : 1h52
Quelle beauté

De quoi ça parle : En 2123, la Terre est stérile et l’humanité obligée de survivre sous d’immenses dômes. Pour recréer et maintenir un nouvel écosystème, chaque personne est systématiquement transformée en arbre à ses 50 ans. Après la mort de son fils, Anna se porte volontaire pour être transformée, mais son mari Stefan est résolu à la sauver.

Pourquoi c’est très surprenant : Sky Dome 2123 est un film d’animation et de science-fiction hongro-slovaque qui n’a a priori rien de très original avec son intrigue dystopique à cheval entre Soleil Vert et la série Under the Dome. Mais c’est parce qu’il tord les motifs les plus familiers et déjoue les pronostics les plus évidents que ce long-métrage se distingue autant.

Alors que tout laisse penser que l’histoire sera une course contre la montre pour que le protagoniste sauve sa femme suicidaire, la narration opte au contraire pour un rythme lent, parfois léthargique, comme si elle sortait du coma. Le but est de prendre le temps, de laisser défiler les minutes pour jouir d’une forme de vacuité, allant ainsi à l’encontre d’un quotidien où la moindre seconde doit être mise à profit.

Résultat : un récit mélancolique, des plans contemplatifs, un jeu d’acteur tout en retenue et des silences plus apaisants que pesants, non sans grâce et poésie, en particulier dans le final. Le film est aussi d’une humilité saisissante lorsqu’il aborde la condition humaine, le poids de nos erreurs et notre appartenance à quelque chose de plus grand et important que nous. Sky Dome 2123 est donc une magnifique réflexion sur le temps, l’amour, la vie et la mort.

Ça te plaira si t’aimes : Soleil VertLa route, les films post-apo

19 ex-aequo. pauvres créatures

  • Sortie : 17 janvier 2024
  • Durée : 2h21

De quoi ça parle : Les aventures de Bella Baxter, création d’un scientifique brillant et farfelu ayant greffé le cerveau d’un fœtus dans le corps d’une femme décédée.

Pourquoi c’est un bijou : Pauvres créatures est un vrai terrain d’expérimentation existentielle pour les personnages et les spectateurs, abordant une myriade d’aspects de la vie avec la spontanéité de nos quotidiens, notamment grâce au talent de Yorgos Lanthimos. La capacité du cinéaste à er de la comédie noire à l’horreur sanglante, de la romance subversive au suspense anxiogène, du conte de fées au cauchemar violent, en un cadre, zoom ou séquence crée largement le charme de l’ensemble (en plus de la musique de Fendrix et la photo de Ryan).

D’où cette sensation permanente pour les spectateurs de se perdre dans un imaginaire complètement inédit, jonglant à la fois entre le surréalisme, la science-fiction (les effets spéciaux sont vraiment fabuleux) et l’anachronisme. Une volonté de décontenancer le spectateur propre au cinéma de Lanthimos, toujours accompagné d’un humour corrosif, absurde et irrévérencieux, qui dissimule toutefois un véritable pamphlet féministe, le film dévoilant au fur et à mesure un message puissant et atemporel.

Pauvres créatures suit ainsi Bella, quasi-poupée humaine découvrant le monde qui l’entoure dans un périple à la Candide ou L’ingénu presque hors du temps. De quoi ouvrir les portes d’un conte dépeignant le parcours d’une femme rebootée, littéralement, et donc totalement émancipée des contraintes du système patriarcal. Bella ne s’en révèle que plus touchante au fil de son évolution, notamment grâce à Emma Stone qui livre la performance la plus remarquable et probablement la plus complexe de sa carrière.

Ça te plaira si t’aimes : Barbie, Frankenstein

18. dune : partie 2

  • Sortie : 28 février 2024
  • Durée : 2h46

De quoi ça parle : Paul Atréides apprend les us et coutumes des Fremen et continue de se rapprocher de Chani autant que de son funeste destin.

Pourquoi c’est encore meilleur que Dune : Adapter le roman-fleuve de Frank Herbert n’est pas chose aisée, et ce n’est pas David Lynch qui dira le contraire. On pouvait donc douter d’emblée de l’entreprise de Denis Villeneuve, encore plus après un premier volet froid et surchargé (bien que les avis divergent, surtout dans la rédaction). Un des reproches récurrents du Dune de 2021 concernait sa narration mécanique et fonctionnelle, le film étant surtout une longue introduction qui s’échinait à présenter des fragments de mythologie sans les recoller entre eux, et à tracer en pointillés les grandes lignes de l’histoire, sans jamais ménager les néophytes.

Dune 2 s’avère infiniment plus organique et émotionnelle. Les enjeux politiques, les réflexions philosophiques et les dilemmes moraux se dessinent enfin clairement, tandis que les personnages gagnent en consistance, en particulier le trio formé par Paul, Dame Jessica et Chani. Le parcours initiatique jusqu’ici banal de Paul se tord, tout comme la notion d’héroïsme, à mesure que l’aura du Lisan al-Gaib (le Messie attendu par les Fremen) se superpose à celle du noble héritier des Atréides.

Les promesses sont d’autant plus excitantes pour la suite, que ce soit le rôle grandissant de la princesse Irulan (et par extension celui de Florence Pugh), le scepticisme de Chani qui refuse d’idolâtrer l’homme qu’elle aime, et le basculement de ce dernier.

Ça te plaira si t’aimes : le premier DuneL’Attaque des titans (si si)

17. il reste encore demain

  • Sortie : 13 mars 2024
  • Durée : 1h58
Antoine et Déborah qui parlent des autres pendant la pause café

De quoi ça parle : Après la Seconde Guerre mondiale, une mère de famille dans un petit village italien reste auprès de son mari violent pour essayer de protéger l’avenir de sa fille, qui ne comprend pas pourquoi sa mère ne se rebelle pas.

Pourquoi c’est à ne pas rater : Réalisé et interprété par l’Italienne Paola Cortellesi, ce film féministe a déclenché un petit ouragan sur son territoire, où sa sortie fut précédée d’un énième féminicide ayant profondément choqué la population, le faisant apparaître comme une réponse engagée face aux violences sexistes. Mais Il reste encore demain est bien plus qu’un phénomène de hasard : le film étonne par ses paris formels, aussi riches que référencés.

Empruntant largement à la comédie italienne des années 60, autant par son élégante photographie en noir et blanc que par le ton de ses séquences presque vaudevillesques, la réalisatrice insuffle aussi beaucoup de modernité dans son film. Non seulement ses cadres et ses mouvements de caméra viennent casser une tendance qui pourrait être trop théâtrale, mais des morceaux de musique actuelle savamment choisis viennent relever l’ensemble avec goût. Terriblement politique, terriblement joli, parfois terriblement drôleIl reste encore demain est le film qui réunit dans sa modestie la poésie du cinéma et la puissance de l’engagement. 

Ça te plaira si t’aimes : La Vie est belle, Thelma et Louise, Persepolis

16. kinds of kindness

  • Sortie : 26 juin 2024
  • Durée : 2h44

De quoi ça parle : Un homme dont la vie est écrite par un autre, la paranoïa grandissante d’un mari envers sa femme et la quête d’un prophète par les membres d’une étrange secte.

Pourquoi c’est un triple plaisir : Yorgos Lanthimos avait légèrement dévié de sa trajectoire très sombre et cynique avec La Favorite et Pauvres créatures, et c’est donc forcément un plaisir de le voir retrouver la cruauté de ses débuts avec Kinds of KindnessD’autant plus que le cinéaste a décidé de raconter trois petites histoires différentes (lié uniquement par un mystérieux personnage). Et qui dit trois petites histoires dit donc trois fois plus d’interactions déjantées, de situations loufoques, de personnages étranges et de farces jubilatoires.

Yorgos Lanthimos s’en sert ainsi pour décortiquer les paradoxes de la vie humaine et explorer un peu plus les enjeux qui ont toujours été au cœur de son cinéma : l’emprise, le besoin d’être aimé, l’identité ou encore le libre arbitre. Et c’est d’autant plus fascinant que, si les trois récits se répondent, Lanthimos pousse les curseurs progressivement pour er d’un récit très réaliste à une quête lorgnant pleinement dans le fantastique.

Alors quand l’ensemble est en plus porté par un casting de rêve, dont l’excellente Emma Stone (devenue la muse du Grec) et surtout Jesse Plemons, véritable caméléon incarnant à la fois un souffre-douleur, un flic complètement borné et un fanatique quasi-robotique.

Ça te plaira si t’aimes : Le cinéma de Yorgos Lanthimos, Twilight Zone

15. city of darkness

  • Sortie : 14 août 2024
  • Durée : 2h05
Cœur sur Louis Koo

De quoi ça parle : Dans les années 80, un migrant clandestin se réfugie dans la cité de Kowloon, bidonville et zone de non-droit de Hong Kong pour lequel les Triades s’apprêtent à s’affronter.

Pourquoi c’est à ne pas rater : Dans la continuité du génial Limbo, Soi Cheang fait de Hong Kong ce labyrinthe identitaire, au sein d’un cinéma toujours plus hanté par sa mutation et son homogénéisation avec l’industrie chinoise. En tant que film d’action, City of Darkness était le shot d’adrénaline à ne pas rater. Galvanisant dans ses cascades et son découpage des chorégraphies, le film doit beaucoup au décor étouffant de la cité de Kowloon, dont le cinéaste exploite le moindre centimètre carré.

Par ailleurs, c’est bien ce lieu, démantelé en 1993 à l’orée de la Rétrocession, qui donne tout son poids émotionnel au long-métrage. Le film fait du bidonville un fantasme de cinéma, et par extension le dernier bastion métaphorique de toute une époque. Il y a dans City of Darkness une mélancolie évidente, la sensation d’assister à l’un des derniers tours de piste d’une culture qui nous a tant fait vibrer. C’est peut-être aussi pour cette raison que le film ne cesse de muter, démarrant comme un polar rêche à la Johnnie To, avant d’évoluer avec délice dans le drame familial aux accents tragiques, et dans le pur film de kung-fu extravagant.

Ça te plaira si t’aimes : le cinéma de John Woo et Tsui Hark, John Wick, Ip Man

14. Challengers

  • Sortie : 24 avril 2024
  • Durée : 2h11
Qui veut vraiment pécho qui ?

De quoi ça parle : Deux tennismen à la fois amis et rivaux vont s’affronter aussi bien pour le titre de champion que pour les faveurs de la belle Tashi, ignorant des ficelles que tire la jeune femme.

Pourquoi c’est si sexy : Challengers aura autant été loué pour son importante charge érotique que critiqué pour son absence de scènes de sexe entre Zendaya, Mike Faist et Josh O’Connor. C’est tout le pari de Luca Guadagnino, qui parle ici brillamment de toute les manières que la sexualité a de s’exprimer en dehors du sexe en lui-même. A travers le récit d’une ion sportive pour le tennis, Guadagnino met en scène un trio de personnages imbuvables mais ionnants, qui ne recherchent finalement qu’une chose : la jouissance ultime.

Et celle-ci ne se cache pas là où ils commencent par la chercher (au pieu), mais sur le cours de tennis, révélateur des désirs inavoués. Le réalisateur se fait roi de la métaphore sexuelle et mise sur des plans expérimentaux, un montage haletant et une musique obsédante pour changer toutes ses séquences en parades amoureuses (à peine) dissimulées. Un drôle de pari, casse-gueule et pourtant brillamment relevé, qui doit aussi sa réussite à son éclatant casting, le trop rare Mike Faist en tête.

Ça te plaira si t’aimes : Call Me by Your Name, Match Point, 5ème Set

13. hundred of beavers

  • Sortie : 30 octobre 2024 (sur FILMO)
  • Durée : 1h48
Hundreds of Beavers
Ils ne mentaient pas sur le titre

De quoi ça parle : D’un producteur de cidre forcé de s’improviser trappeur lorsqu’une horde de castors sabote son exploitation. En pleine opération de survie, il se résout à braconner les causes de ses malheurs pour obtenir la main de la fille du vendeur.

Pourquoi c’est à ne pas rater : Hundreds of Beavers sort de nulle part, ne paie pas de mine, mais a retourné tous les festivals où il a été diffusé, et on comprend pourquoi. La comédie réalisée pour 3 balles et un mars par Mike Cheslik est l’une des plus drôles de récente mémoire. C’est bien simple : on a jamais vu ça. Des films qui rendent hommage au genre du splapstick, ayant fait les belles heures d’Hollywood dans les années 1920 et 1930, on en a vu plusieurs, mais peu poussent le concept dans de tels retranchements. Et surtout, peu y ajoutent une dose de culture internet.

Le mélange pourrait sembler imbuvable, mais le cinéaste et son coscénariste Ryland Brickson Cole Tews parviennent justement à démontrer que l’esthétique amatrice, absurde, voire faussement je-m’en-foutiste contemporaine est en fait complètement compatible avec le divertissement d’il y a un siècle. S’ensuit une ribambelle de gags empruntant simultanément au jeu vidéo et au comique de geste de Buster Keaton, pour certains sidérants d’inventivité (le coup de la chique !), de complexité (le cercle de pièges) et d’ambition (l’ahurissante dernière demi-heure). Irrésistible.

Ça te plaira si t’aimes : Buster Keaton, Charlie Chaplin, L’armée des Ténèbres et The Legend of Zelda

12. here – les plus belles années de notre vie

  • Sortie : 6 novembre 2024
  • Durée : 1h44
Robin Wright et Tom Hanks dans Here
Le début d’une aventure à couper le souffle

De quoi ça parle : L’histoire d’une famille sur plusieurs générations, du fils de Benjamin Franklin, d’un couple d’inventeur, d’une tribu indienne, des dinosaures… le tout sans bouger d’un centimètre.

Pourquoi c’est à ne pas rater : On pouvait craindre que Robert Zemeckis ne retrouverait plus sa maestria d’antan. Lui qui nous a tant émerveillé (les Retour vers le futur, La Mort vous va si bien, Forrest Gump, Qui veut la peau de Roger Rabbit ?…) semblait bloqué depuis quelques années, au point de carrément sombrer dans l’affreuse mode des remakes avec Sacrées sorcières en 2020 et Pinocchio en 2022. C’était toutefois le mésestimé une fois de plus puisque son adaptation du roman graphique de Richard McGuire, Here, est une merveille.

Robert Zemeckis, avec l’aide son scénariste Eric Roth, livre une expérience de cinéma hors-du-commun grâce à son dispositif à la fois vertigineux et ultra-simple : observer l’évolution du monde à travers un plan fixe. Concrètement, c’est une fresque sur l’humanité et la Terre où la caméra reste parfaitement immobile (à une petite exception près). S’il se concentre plus particulièrement sur la vie d’une famille américaine (où l’on retrouve Tom Hanks et Robin Wright) sur près d’un siècle, Zemeckis y raconte tout un monde.

Il en résulte une idée de cinéma absolument fantastique sur les souvenirs, les regrets, les espoirs, les désillusions, le temps qui e, celui qui détruit et construit tout, répare, blesse et nous file inévitablement entre les doigts. Et même si l’utilisation de l’IA sur Here crée la polémique à Hollywood, difficile de ne pas être impressionné par le rendu final.

Ça te plaira si t’aimes : L’Etrange histoire de Benjamin Button, Forrest Gump, Wavelength

11. flow, le chat qui n’avait plus peur de l’eau

  • Sortie : 30 octobre 2024
  • Durée : 1h25
flow
L’Incroyable Voyage

De quoi ça parle : D’un petit chat peureux affrontant un raz-de-marée apocalyptique qui engloutit tout son monde. Il trouve refuge à bord d’une petite embarcation, et traverse ce nouveau royaume avec quelques autres animaux perdus.

Pourquoi c’est un voyage vraiment fantastique : C’est d’une simplicité, d’une pureté et d’une poésie fabuleuses, qui fonctionnent d’autant mieux à côté du bulldozer Le Robot Sauvage des studios Dreamworks, avec lequel les liens sont nombreux. Mais Flow, de Gints Zilbalodis, a choisi la voie de la sagesse avec une aventure muette, où tout e par les yeux, les silences, et les musiques. Pas un mot et pas un Homme pour tout raconter de la vie, autour d’un petit groupe d’animaux (un chat, un capybara, un chien, un lémurien et un messager sagittaire).

Flow tire sa force d’un beau paradoxe. D’un côté, c’est un film d’absence, qui se déroule dans un monde vidé des humains, des dialogues, et des repères. Et en même temps, il y a tellement de choses à voir, comprendre et imaginer que la toile blanche devient de plus en plus vivante et chargée au fil des péripéties. Ce serait un peu facile de résumer Flow à une fable écolo sur le vivre-ensemble, puisque ça atténuerait ses pures qualités de cinéma : un voyage d’une beauté formidable, traversé par des moments de grâce (la scène de l’oiseau sur la montagne, la fin avec la baleine), et qui laisse au public le choix de se raconter la bonne histoire dans cette fin du monde qui n’en est peut-être pas une.

Ultimes raisons de l’aimer : produit entre la Lettonie, la Belgique et la , Flow a coûté 3,5 millions d’euros, et le réalisateur Gints Zilbalodis a également co-écrit le scénario et la musique, superbe. C’est ce qu’on appelle un grand artiste, et une réussite extraordinaire.

Ça te plaira si t’aimes : Le Robot sauvage, L’Incroyable Voyage, le jeu vidéo The Last Guardian

10. Sans jamais nous connaître

  • Sortie : 14 février 2024
  • Durée : 1h45
Mélancolie dansante

De quoi ça parle : Alors que sa routine solitaire est chamboulée par un début d’histoire d’amour avec son voisin, Adam retourne dans sa maison d’enfance pour affronter ses souvenirs. Lesquels vont prendre une forme inattendue puisqu’il découvre que ses parents occupent les lieux, et semblent avoir le même âge que le jour de leur mort, il y a plus de 30 ans.

Pourquoi c’est magnifique (et magnifiquement triste) : Avec Week-end45 ans et la série Looking (dont il a réalisé les 3/4 des épisodes, en plus d’en être producteur exécutif), le réalisateur et scénariste Andrew Haigh avait déjà prouvé ses talents pour filmer l’intimité, avec une frontalité et une sensibilité extraordinaires. Il e encore un cap avec Sans jamais nous connaître, adapté de Taichi Yamada.

En utilisant une baguette magique pour agiter des fantômes lourds de sens, il compose un grand film sur les petites solitudesSans jamais nous connaître raconte comment on comble les vides en (se) racontant des histoires, et comment les problèmes de timing font et défont des vies. C’est d’une beauté folle, avec une infinie tristesse derrière la tendresse.

Paul Mescal est beau à tomber, mais c’est Andrew Scott qui impressionne le plus, avec un jeu d’une subtilité fantastique – rien que la scène où il s’effondre en larmes devant son père. Après ça, la chanson The Power of Love de Frankie Goes to Hollywood ne sera plus jamais la même.

Ça te plaira si t’aimes : Keep the Lights OnMysterious Skin

9. when evil lurks

  • Sortie : 19 juillet 2023
  • Durée : 1h40
When Evil Lurks : photo
Une scène difficile à oublier

De quoi ça parle : Un esprit démoniaque se répand dans un village comme une épidémie, et transforme ses victimes en monstres. Quelques personnes tentent d’en réchapper, tout en cherchant la source du mal pour le stopper.

Pourquoi c’est un délice de sang : Si la fin semble à ce point conventionnelle, c’est parce que tout ce qui la précède est d’une brutalité et d’une cruauté prodigieuses. Réalisé et écrit par l’Argentin Demián Rugna (Atterados), When Evil Lurks emprunte pourtant au film de zombie ses codes les plus classiques (la petite communauté, la contamination), avant de bifurquer vers le film d’exorcisme (sa partie la moins intéressante).

Qu’y a-t-il de si fort et puissant alors ? La cruauté, la violence et le sang, tout simplement. When Evil Lurks démarre sur les chapeaux de roue, avec une étonnante envie de malmener les corps (qu’ils soient putrescents ou pulvérisés) et appuyer là où ça fait mal (les enfants, les animaux, les vieux, tout le monde y e). Très vite, le cauchemar prend la forme d’une course apocalyptique brillamment mise en scène. Les quelques bavures d’écriture ne sont alors que des détails dans ce petit tour de force, qui imprime au sang quelques images absolument mémorables.

Ça te plaira si t’aimes : les films de Lucio Fulci, The Sadness

8. The Substance

  • Sortie : 6 novembre 2024
  • Durée : 2h20

De quoi ça parle : Une ancienne gloire du cinéma se fait virer de sa propre émission d’aérobic. Le jour où elle découvre une substance capable de créer un double jeune et idéalisé d’elle-même, elle va tenter de reconquérir sa place en faisant fi des risques.

Pourquoi c’est à ne pas rater : Dans ce film au gore flamboyant qui est à la fois le grand come-back de Demi Moore et la grande confirmation de Margaret Qualley, Coralie Fargeat aborde avec cruauté et intelligence la question de la représentation du corps des femmes dans les médias, et ses conséquences directes sur lesdites femmes, atteintes au plus profond de leur chair par cette oppression. The Substance est aussi barré dans son scénario qu’explosif à la mise en scène, mais il a déjà été trop réduit à ses nombreuses références (Cronenberg, Kubrick, Carrie, Frankenstein, Society…).

Pourtant, il utilise ses inspirations comme point de départ pour développer de nouveaux propos, bien plus fins que ce que son jusqu’au-boutisme visuel pourrait le laisser penser. A sa manière d’opposer méticuleusement les images figées sous forme de portraits glacés et les gros plans sur la matière organique du corps, on comprend que Coralie Fargeat livre ici, en réalité, la meilleure des adaptations du Portrait de Dorian Gray. Avec second degré et cruauté, la beauté devient horreur, le sex-appeal devient torture, et la femme devient monstre pour enfin se libérer.

Ça te plaira si t’aimes : Cronenberg, Kubrick, La Mort vous va si bien

7. les graines du figuier sauvage

  • Sortie : 18 septembre 2024
  • Durée : 2h47
Ne plus se laisser aveugler

De quoi ça parle : Un juge d’instruction et père de famille voit son arme de fonction disparaître au moment où d’immenses manifestations éclatent à Téhéran notamment le mouvement Femme, Vie, Liberté. Il commence alors soupçonner sa femme et ses filles et à devenir de plus en plus parano et inflexible.

Pourquoi c’est à ne pas rater : Même s’il n’a reçu qu’un Prix spécial du jury pour son age à Cannes pour saluer le geste militant de Mohammad Rasoulof, Les Graines du figuier sauvage est une œuvre au moins aussi politique que cinématographique. C’est là la puissance de son récit d’une densité hallucinante. Contraint par ses condamnations et son assignation à résidence, l’Iranien a manqué de moyens pour réaliser Les graines du figuier sauvage (ce qui se sent parfois visuellement) mais il ruse pour raconter l’enfer iranien.

Au lieu de recréer la réalité, le cinéaste la montre, tout simplement, en insérant les vidéos amateurs des vraies émeutes circulant sur les réseaux sociaux au sein de sa fiction. De quoi livrer un pamphlet d’une force inouïe sur la tyrannie iranienne, son oppression et la résistance à mener face à cette gouvernance indigne de confiance, mensongère et corrompue. Avec intelligence, Rasoulof filme ainsi l’émergence d’une nouvelle génération déterminée à faire basculer ce régime d’un autre temps (les adolescentes) et le courage des femmes luttant pour leurs droits et liberté.

C’est d’autant plus fort que Les graines du figuier sauvage le fait avec virtuosité, au coeur d’un drame social muant progressivement en huis clos familial, thriller psychologique, voire histoire de vengeance féministe. Du très grand cinéma.

Ça te plaira si t’aimes : Le cinéma iranien engagé de Saeed Roustayi (La loi de Téhéran, Leila et ses frères), de Jafar Panahi (Taxi Téheran) ou d’Ali Abbasi (Les nuits de Mashaad)

6. may december

  • Sortie : 24 janvier 2024
  • Durée : 1h57
Deux performances de dingues

De quoi ça parle : Il vaut mieux ne rien savoir avant de regarder le film, mais si vous insistez, ça parle d’une actrice qui, pour travailler un rôle, va s’incruster dans le quotidien d’une femme qui a fait de la prison pour avoir entamé une relation avec un homme mineur à l’époque, qu’elle a fini par épo. A force de s’inspirer de son modèle, l’actrice commence à se confondre avec elle.

Pourquoi c’est si bizarre mais si brillant : Le coup de génie de Todd Haynes (qui fait quand même souvent des coups de génie, il faut le dire), c’est de ménager aussi longtemps le suspense autour de l’intrigue de May December. Pendant tout le premier acte, impossible de savoir qui est qui, quel est le contexte, et quelles sont les relations entre les personnages. L’étrangeté de la situation existe par elle-même. Puis, au fur et à mesure que les pièces du puzzle s’assemblent, le malaise ne fait que grandir, mais il est déjà trop tard : les personnages sont déjà mouillés jusqu’au cou, et le spectateur aussi.

En brossant le portrait de deux personnages féminins terriblement manipulateurs à sa manière, Todd Haynes parle d’emprise, d’égotisme et de vanité, avec cynisme et humour, mais aussi comion. Sur le devant de la scène, Natalie Portman et Julianne Moore se disputent la vedette dans l’histoire et pour de vrai, en incarnant deux prédatrices soumises à la dictature des apparences. Un film qui décontenance, mais qui fait surtout mouche.

Ça te plaira si t’aimes : Qu’est-il arrivé à Baby Jane ?Le Lauréat

5. knit’s island, l’île sans fin

  • Sortie : 17 avril 2024
  • Durée : 1h35
Knit's Island, l'île sans fin : photo
Jusqu’au bout du monde

De quoi ça parle : D’un jeu vidéo, Day Z, et des joueurs qui habitent ses serveurs role-play.

Pourquoi c’est à ne pas rater : Knit’s Island est un documentaire, qui emmène une vraie-fausse équipe de tournage dans un jeu vidéo de survie intitulé Day Z. Les graphismes sont assez datés, les missions données par le jeu inexistantes. Mais ce n’est pas ce qui intéresse Ekiem Barbier, Guilhem Caussen, Quentin L’helgoualc’h ou les joueurs qui le peuplent. Ce qui les intéresse, c’est cette petite communauté, ou plutôt ces petites communautés qui ont élu domicile dans cet univers virtuel et y font à peu près ce qu’ils veulent, du rituel sectaire à la rave-party.

La réussite du film tient principalement à son dispositif : les cinéastes ont choisi de jouer le jeu, au propre comme au figuré, et donc d’immerger le spectateur dans ce monde dévasté comme s’il s’agissait d’un monde réel parallèle au nôtre. Sauf que de temps à autres, un cri de bébé, une réaction bizarre, un glitch ou même une discussion sincère et touchante entre deux membres d’un couple font dérailler l’illusion. Et ainsi créent une sorte de fantastique inversé, où l’étrangeté vient des touches de réalité.

Pas question d’en profiter pour se moquer de qui que ce soit ou pire, pour déplorer la mainmise de la technologie dans nos vies, bien au contraire. Les personnages hauts en couleur qui se succèdent, les paysages pixelisés, parfois explorés jusqu’au métaphysique, ont tous quelque chose de profondément poétique. Comme un rappel, après le Fiasco du Metaverse de Mark Zuckerberg, que les gens n’ont pas attendu l’aval des GAFAM pour faire société, pour se retrouver dans des espaces alternatifs où ils pourront exercer en toute liberté leur humanité.

Ça te plaira si t’aimes : le jeu de rôle, le jeu-vidéo

4. furiosa

  • Sortie : 22 mai 2024
  • Durée : 2h28

De quoi ça parle : Dans le Wasteland, la jeune Furiosa est arrachée à la Terre Verte et faite prisonnière par les hommes du redoutable Dementus. Au milieu des guerres intestines de ce monde post-apocalyptique, la future Imperator ne rêve que d’une chose : sa vengeance.

Pourquoi c’est le chef-d’œuvre espéré : Mad Max : Fury Road s’est imposé tellement vite comme un monument qu’on pouvait craindre ce prequel. D’un autre côté, c’était bien mal connaître George Miller que de l’imaginer se reposer sur ses lauriers. Si Furiosa s’inscrit visuellement et thématiquement dans la continuité démente de son prédécesseur (cette course-poursuite en War Rig dont on ne se remet pas), il en prend aussi le contrepied. Loin de la temporalité réduite et de la frénésie de Fury Roadle film se présente en véritable épopée, s’étalant sur plusieurs décennies au travers d’un chapitrage hérité des contes de 3000 ans à t’attendre.

Dans cet environnement vide, privé de biosphère, les transferts d’énergie n’ont plus rien de naturel. Tout est violence et rétribution, cycles de vie et de mort insatisfaisants dont les justifications finissent par s’oublier, au point où Miller fait le choix, volontairement décevant, de résumer en un court montage un élément majeur de sa chronologie. Le Wasteland est plus que jamais interrogé sur ses symboles mythologiques, tandis que son héroïne devient malgré elle une figure héroïque et tragique.

Si ce monde désolé reflète un néant spatial, c’est peut-être pour mieux y projeter l’importance du temps qui le traverse. Voilà le vrai cycle, la vraie biosphère de ce territoire : sa capacité à engendrer des histoires et des mythes, à faire tourner à plein régime un imaginaire qui scotche par son sens du détail.

Ça te plaira si t’aimes : Mad Max : Fury RoadHappy Feet (oui), Ben-Hur

3. Anora

  • Sortie : 30 octobre 2024
  • Durée : 2h19
Mark Eydelshteyn et Mikey Madison dans Anora
Un plan pour raconter tout le film

De quoi ça parle : Anora est une jeune strip-teaseuse d’origine ouzbek qui rencontre un fils d’oligarque russe qui promet de changer sa vie.

Pourquoi c’est à ne pas rater : Anora est assurément du meilleur film de Sean Baker et celui qui conclut tout un pan de sa filmographie. Anora est aussi et surtout le prénom de la protagoniste jouée par l’excellente Mikey Madison (dont la carrière ne peut que s’envoler après une telle performance). L’intrigue a beau démarrer comme une belle histoire d’amour qui revisite Cendrillon et Pretty Woman, Sean Baker préfère raconter le chaos humain, la lutte des classes et les rapports de pouvoir et domination (notamment ceux asymétriques entres les hommes et les femmes).

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Tout ça sous le prisme du travail du sexe qui encapsule et entremêle toutes ces notions. Le cinéaste démolit donc une bonne fois pour toutes le fantasme du rêve américain, mais opte pour la comédie pinçante plutôt que le drame misérabiliste, quand bien même le sujet reste l’exploitation des femmes et des classes populaires. On se retrouve ainsi à naviguer entre la comédie romantique, le home invasion (de bras cassés) et le polar urbain avec cette quête nocturne dans Brooklyn.

Il ne cède pas non plus à la tentation de faire d’Ani une héroïne ou victime parfaite sous toutes les coutures. Son personnage est d’autant plus marquant qu’il parvient toujours à faire un pas de côté par rapport à ce qu’on peut en attendre. é la bascule humoristique, elle lutte littéralement pour revenir au premier plan, pour garder une emprise sur son histoire et c’est bien cette impuissance qui rend le film si pertinent et déchirant sur la fin.

Ça te plaira si t’aimes : les autres films de Sean Baker (Red Rocket, The Florida Project, Starlet ou Tangerine), Pleasure, la série Masters of Sex, Good Time des frères Safdie

2. les chambres rouges

  • Sortie : 17 janvier 2024
  • Durée : 1h58
Juliette gariépy les chambres rouges
Un rouge sang qui hante

De quoi ça parle : Kelly-Anne est une jeune mannequin qui, quand elle ne pose pas pour les magazines, e son temps au tribunal pour assister au procès d’un tueur en série auquel elle voue une obsession morbide. Est-ce pour satisfaire ses fantasmes malsains ou pour prouver la culpabilité de l’accusé qu’elle va se perdre sur le dark web, à la recherche de la vidéo insoutenable du meurtre d’une adolescente ?

Pourquoi c’est si génial et troublant : 2024 a commencé très très fort avec la sortie, dès le mois de janvier, de l’une des perles de l’année. Les Chambres rouges, thriller québécois réalisé par Pascal Plante, avait déjà connu son petit succès outre-Atlantique avant qu’il n’arrive dans les salles françaises, où sa distribution fut malheureusement modeste. Pourtant, ce film porté par l’interprétation de Juliette Gariépy ne ressemble à aucun autre. Avec son sujet aussi original que dérangeant, il parvient à troubler profondément tout en restant dans la suggestion, sans jamais montrer de sang ni même de violence.

Plante réussit le pari de parler de relation parasociale et d’iration morbide pour un tueur sans jamais basculer dans le voyeurisme ni dans la moindre glorification. Alliant froideur chirurgicale de la mise en scène, parallèles audacieux avec la légende arthurienne et bande-originale baroque et étourdissante signée par son frère Dominique Plante, le réalisateur québécois livre avec son troisième film une œuvre ni plus ni moins que géniale.

Ça te plaira si t’aimes : Le Silence des AgneauxTémoin Muet

1. La zone d’intérêt

  • Sortie : 31 janvier 2024
  • Durée : 1h45

De quoi ça parle : Le commandant d’Auschwitz, Rudolf Höss essaie de se façonner avec sa femme Hedwig une vie de rêve dans leur maison aux abords du camp d’extermination.

Pourquoi c’est à ne pas rater : Parce que Jonathan Glazer choisit de filmer le quotidien aberrant d’une famille nazie au plus près de l’Holocauste. Beaucoup a déjà été dit sur le hors-champ brillant de La Zone d’intérêt, qui interroge plus que jamais l’éthique dans la mise en scène de la Shoah. En ne montrant jamais ce qui se e derrière la palissade des Höss, le film engendre un malaise encore plus tétanisant, puisque ses personnages s’habituent aux bruits et aux odeurs. Ils ne sont pas des monstres sanguinaires, mais bien de simples parvenus médiocres, plus proches de nous qu’on ne voudrait l’ettre.

Alors qu’on s’immerge nous aussi dans son bruit de fond permanent (merveilleux travail de mixage sonore), La Zone d’intérêt dépeint l’horreur de la Shoah par une autre forme de monstration et d’exhibition : celle d’un jardin d’Eden indécent, d’un coin de paradis obscène, rendu encore plus prégnant par la froideur de son dispositif magistral (ses caméras fixes qui « surveillent » les protagonistes). Tout est dans le geste et ses répétitions, où l’on e son temps à allumer ou éteindre des interrupteurs, à ouvrir ou fermer des portes. Par certains appels téléphoniques et autres lettres récitées, Glazer appuie la fabrication bêtement istrative de la solution finale, tout en marquant par son hors-champ l’industrialisation de la mort à grande échelle.

Ça te plaira si t’aimes : Shoah, les autres films de Jonathan Glazer (surtout Under the Skin)

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Marc en RAGE
Marc en RAGE
il y a 4 mois

⭐ DUNE 2. On retrouve PAUL Jessica Chani Stilgar , Une grande bataille entre les FREMEN est le BARON , Paul est nommé Paul Muad’Dib Usul… Pour ceux qui on apprécié DUNE , DUNE deuxième partie est encore plus spectaculaire PAUL doit monté un Ver de Sable cette scènes est a couper le souffle. L’arrivé de L’EMPEREUR et son vaisseau avec une surface miroir. A la fin de DUNE 2 on a qu’une envie de voir la suite DUNE 3. C’est époustouflant la moitié de la salle est restée juste à la fin du générique nous avons écouté un titre de Hanz Zimmer très inspiré. ☆☆☆☆☆
⭐ FURIOSA
En un seul mot » LA VENGEANCE » Nous découvrons qu’il y a une EDEN vert dans le désert brulant. La première Partie nous découvrons FURIOSA enfants et sa mère exécuté par DEMENTUS Le début pour FURIOSA un long périple . Dans ses yeux la mort de sa mère crucifié et condamné par son pire ennemi . La légende FURIOSA s’écrit devant nos yeux , George MILLER au sommet de sont ART nous explose la rétine . Flamboyant. ☆☆☆☆☆

Marc en RAGE
Marc en RAGE
il y a 5 mois

Bonne année 2025 🎉 la Rédaction ✌️

liojen
liojen
il y a 5 mois

Ne pas citer Le Robot Sauvage est assez incompréhensible… (et qu’aucun des rédacteurs ne l’ai dans son topencore plus…)

Sanchez
Sanchez
il y a 5 mois

Et voilà mon top que le monde attendait :
5- Kind of kindness
4- L’empire (le film sorti en février a disparu des radars, aucun blu ray en vu…)
3- May december (meilleur scénario de l’année)
2- Love Lies Bleeding (confirmation de la plus grande cinéaste de genre Rose Glass et la découverte Katy O’Brian)
1- Anora (une palme aussi culte que pulp fiction, plusieurs niveaux de lecture , la beauté de la peluche et biensur , Toros <3)

Dario De Palma
Dario De Palma
il y a 5 mois

Un peu surpris de l’absence de FERRARI dans ce top mais nul doute que la sortie « direct to video Amazon! » lui a fait du mal et le film semble avoir quelque peu divisé chez ceux qui apprécient Mann comme ce fut déjà le cas pour ses précédents opus (HACKER, PUBLIC ENEMIES et MIAMI VICE)…quelle tristesse!

Pour le reste dans votre liste pas mal de films que je n’ai pas vus, un que je n’ai pas aimé (FURIOSA), un autre qui m’a déçu (ANORA) et ceux qui m’ont laissé mitigé (IRON CLAW, MEMORY, THE SUBSTANCE)

Je pense que ma séance préférée de l’année restera FLOW LE CHAT QUI N’AVAIT PLUS PEUR DE L’EAU, visuellement étonnant, immersif, poétique et touchant récit de survie.

Ensuite, plus loin, pas de grands films mais quelques séances sympathiques néanmoins:

LA VIE REVEE DE MISS FRAN
LE ROMAN DE JIM
NI CHAINES NI MAITRES
THE OUTRUN
TROIS AMIES
ANIMALE
HORS SAISON
JUSQU AU BOUT DU MONDE
EMMANUELLE

Ranger solitaire
Ranger solitaire
il y a 5 mois

Argyyylle 🩷
Monte-Cristooo
Dune devrait être dans le classement des flops, je n’aime pas le sable

Marc en RAGE
Marc en RAGE
il y a 5 mois

🔥🔥🔥FURIOSA 🔥 🔥 🔥 CHEF-D’OEUVRE

zarbiland
zarbiland
Abonné
il y a 5 mois

Ce classement de dépressifs. Je pensais être sur écran large, en découvrant le classement, j’ai halluciné. On en vient même à se demander ce que fout Furiosa dans le top de ce classement

alexandredomenach
alexandredomenach
il y a 5 mois

Chambres rouges et May december je valide a fond !
par contre The Apprentice est pour moi l’énorme oubli de ce top!!

naughtysoft
naughtysoft
il y a 5 mois

Je n’ai vu que Dune de cette liste. Le reste n’entre pas dans mes centres d’intérêt