On revient (avec amour et ion) sur le film Terror of Mechagodzilla, le faux nanar Godzilla de 1975 qui mérite d'être réévalué.
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2024 est l’année de Godzilla. D’abord parce qu’il souffle ses 70 bougies cette année (visualisez bien la scène : Godzilla qui crache son rayon radioactif sur un joli gâteau d’anniversaire calciné), mais aussi parce que pour la première fois, le lézard japonais a remporté un Oscar ! Pour les effets spéciaux uniquement diront les mauvaises langues, mais il faut comprendre ce prix comme une sorte de récompense symbolique qui vient célébrer le succès critique et public de Godzilla Minus One sur le territoire américain.
Mais la réussite du blockbuster de Takashi Yamazaki n’est pas si surprenante, tant le film semble avoir été pensé pour un large public, n'étant jamais trop bizarre ou dépaysant pour son spectateur. Car la franchise Godzilla a été à une époque l’incarnation la plus emblématique de ce qui est, selon vos appétences, le must du nanar japonais, ou la crème de la crème du pulp décomplexé nippon. La preuve en analyse avec le cas de Terror of Mechagodzilla (aussi connu en sous le titre Les Monstres du continent perdu), le film qui a clôturé la première saga Godzilla des studios Toho en 1975.
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Monster Nanarland
La métamorphose de la figure de Godzilla, et de la facture même des productions de la Toho sur les quinze films de la franchise (sans compter les autres films de monstres qui existent dans le même univers partagé comme Rodan ou Mothra), a quelque chose d’à peine croyable quand on y pense. Imaginez : en 1954, le producteur Tomoyuki Tanaka charge Ishirô Honda de réaliser un film de monstres.
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Le résultat ? Une histoire d’horreur pleine de scènes catastrophes où le monstre fait des centaines de victimes. Le tout dans un noir et blanc impitoyable et étouffant qui rend la figure nucléaire de Godzilla terrifiante, et ce malgré le manque de moyens et de temps de l’équipe effets spéciaux d’Eiji Tsubaraya. Et puis…
13 ans plus tard, Godzilla a fait un relooking complet. Il est désormais en couleur et en Cinémascope, et il est devenu le gentil héros des Japonais.
Quand il n’est pas occupé à chasser les kaijus qui menacent les gentils humains en leur faisant des prises de catch, il apprend à son fils Minilla, un kaiju absolument HIDEUX pensé pour plaire aux enfants (les pauvres), à cracher son souffle radioactif comme papa. À cette époque, les kaiju eiga sont vus par beaucoup (notamment aux États-Unis, où les films Godzilla sont distribués depuis 1955) comme des curiosités un peu ridicules, notamment à cause de leurs scénarios SF très alambiqués.
Terror of Mechagodzilla ne déroge pas à la règle, puisque les esprits les plus obtus ne verront dans le film qu’une compilation de tous les univers les plus bas du front de la culture populaire japonaise : un robot géant, des kaiju/acteurs en costumes qui s’envoient des mandales dans la tronche, des dangereux envahisseurs aliens, une cyborg…
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Godzilla, King of the Box Office
Pour comprendre comment la Toho en est arrivée là, il faut bien entendre que le studio fonctionne principalement et avant tout sur une logique de marché économique. Pour le producteur Tomoyuki Tanaka, il n’y a rien d’organique dans les productions du studio. S’il a eu l’idée de Godzilla en 1953, c’est suite au succès d’une ressortie de King Kong. Si les films deviennent plus orientés pour un public enfantin dans les années 60, c’est parce que les enfants sont une nouvelle cible idéale pour les salles de cinéma.
Et si Terror of Mechagodzilla existe, c’est seulement et totalement parce qu’un an auparavant, le film Godzilla Vs Mechagodzilla a fait beaucoup d’entrées sur le territoire. D’ailleurs, la suite s’ouvre carrément sur un montage des meilleurs combats du volet précédent, histoire de dire à tout le monde que Mechagodzilla est bien présent, et que les spectateurs vont en avoir pour leur argent (même s’il n’est que très secondaire dans le récit cette fois).
Imaginez la tronche des goodies
La présence du double robotique de Godzilla était en fait la seule contrainte donnée aux étudiants du Scenario Center fondé en 1970 par Hajime Arai, à qui il a été proposé un concours d’écriture. La gagnante, Yukiko Takayama, devient la première femme scénariste à avoir écrit un film de la franchise, et à ce jour est encore la seule.
Mais ce qui aurait pu être un énième nanar paresseux (ou plaisir coupable pulp, selon vos appétences) de la période la plus faible des productions de la Toho est finalement devenu un vrai bon film quand Ishirô Honda a accepté de retrouver sa chaise de réalisateur de Godzilla, cinq ans après s’en être éloigné suite au décès de son collaborateur Eiji Tsubaraya, le responsable des effets spéciaux.
La version 2021 (et américaine) de Mechagodzilla
Avec Honda, tout roule
Sur les 15 films Godzilla de la période Showa, Ishirô Honda en a réalisé huit, dont l’original. Il existe deux différences fondamentales entre son travail et celui des autres cinéastes de la période. La première, c’est que personne n'orchestre l’action comme lui, qui propose ici la meilleure apparition de Godzilla en plein combat urbain, des magnifiques plans tournants autour des kaijus avant la bataille, et une exploitation délicieuse des explosions du chef effets spéciaux Teroysuhi Nakano.
La seconde, c’est que le Japon fantaisiste qu’il dépeint paraît toujours plus tangible, plus vivant. Là où ses comparses semblent enfermés dans les miniatures qui servent de décors aux combats de kaiju, trahissant sans cesse l’artificialité de ce monde, Honda force la suspension d’incrédulité par la richesse formelle de son cinéma, mais aussi et surtout par l’humanité qu’il offre aux personnages du film.
Dans Terror of Mechagodzilla, les antagonistes sont des envahisseurs venus d’ailleurs qui souhaitent conquérir le Japon. Rien de très surprenant jusque-là, puisque la majorité des films Godzilla les plus paresseux de la période opposent de manière très schématique et primaire des méchants aliens (qui en général sont juste des Japonais avec des antennes et des costumes qui brillent) et des gentils Japonais.
C’est là que se ressent la patte de Honda, qui a développé le scénario en collaboration avec Yukiko Takayama, puisque les extraterrestres du film sont aidés par un humain. Le Dr Mafune est un scientifique qui a découvert l’existence d’un dinosaure aquatique au large du Japon, qu’il a nommé Titanosaurus. Mais personne n’a voulu le croire. Ostracisé et humilié, il décide de s’allier aux envahisseurs pour ravager le Japon en utilisant Titanosaurus, qu’il peut contrôler à distance.
Mais la vraie réussite du film est le personnage de la fille du Dr Mafune, Katsura. Tragiquement meurtrie par les expériences de son père, elle n’a pu être sauvée que grâce à la technologie des extraterrestres, faisant d’elle une cyborg, c’est-à-dire un être entre deux réalités : le vivant et la machine. Sa nature complexe est au cœur du récit, puisqu’elle se révèle plus humaine que son père, criblée de doutes et d’interrogations quant à la légitimité de la vengeance à laquelle elle participe. Honda ouvre d’ailleurs le film sur elle, dans un plan large d’une poésie inattendue la montrant observant l’océan depuis des rochers sur la côté et l’inscrivant déjà dans une esthétique romantique singulière.
I’m a poor lonesome Kaiju
L’hybridation de Katsura, entre humaine et cyborg, fait en réalité écho à ce que Godzilla est devenu au fil de sa franchise. D’abord monstre vide de toute caractérisation, pouvant être comparé à une catastrophe naturelle, il s’est petit à petit anthropomorphisé, tant dans sa gestuelle que dans son comportement. Pendant la première moitié des années 1970, Godzilla emprunte même une symbolique aux héros de western, puisque ses aventures se terminent par une image de sa silhouette marchant vers le coucher de soleil, accompagnée d’une petite chanson narrant ses exploits de justicier.
Quand Ishirô Honda revient à Godzilla avec ce volet en 1975, il ne peut s’empêcher de tordre le cou à cette tendance et d’en faire sa propre version, plus amère et mélancolique – ses fins de film le sont souvent. Il change l’axe de caméra et filme Godzilla en plongée, et dézoome progressivement pour montrer la créature (pourtant gigantesque) de plus en plus minuscule dans l’océan immense. La musique d’Akira Ifukube se mue alors en une sorte de marche funèbre. Sans le savoir, Ishirô Honda a fait ses adieux au cinéma et à la créature à laquelle il sera à jamais associé avec ce film.
L’échec critique et commercial a été tel qu’aucune suite n'a été lancée, et il a fallu attendre neuf ans et l’ère Heisei pour que Godzilla revienne sur les écrans. Ishirô Honda quant à lui n’a plus jamais souhaité réaliser de film après ça, même s’il a aidé son ami Akira Kurosawa à de nombreuses reprises sur ses tournages, ant donc d’un monstre sacré du cinéma à un autre.
Merci à Fabien Mauro, auteur spécialiste d’Ishirô Honda et de kaijus pour son aide précieuse dans les recherches nécessaires à ce dossier.
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@serievore: Vous parlez de Gérard Depardieu?
Effet nostalgie qui donne envie de replonger dans ces vieux films.
les godzilla font quand meme partie des plis grands films de kaiju. meme sice n est pas ma serie de films preferes.
il y a les 3 grands monstres du cinema, godzilla, king kong, et puis bien sur le 3eme qu il n y a meme plus besoin de citer tellement tout le monde le connait.
et c est vraiment celui la qui restera toujours mon perefere.
meme si tout le monde le connait par coeur, je trouve que ce monstre la dee de loin tous les films avec godzilla, ou king kong.
pour moi, c est vraiment l embleme du monstre geant au cinema. meme les nouveaux films avec godzilla et king kong reunis ne detrone pas ce monstre mythique du cinema.