Film de SF à (tout) petit budget, le Duncan Jones use de poncifs pourtant bien éculés par le genre, et propose un récit prompt à la crise existentielle.
Si cela semble évident, il semblerait qu'une piqure de rappel soit de mise : non, Terminator ne se termine pas nécessairement bien pour l'espèce humaine. À vrai dire, nombreux sont les titres de science-fiction à raconter plus ou moins subtilement que l'Intelligence artificielle représente une sérieuse menace pour l'Homme, et que ce dernier ferait bien de ne pas trop jouer avec le feu tant qu'il en est encore temps.
Pour son tout premier crédit de réalisateur, Duncan Jones semble toutefois avoir tenu à jouer la carte de la nuance. Que l'on ne s'y méprenne pas : que son Moon n'a rien particulièrement optimiste (après tout, il n'y a guère que Pixar pour nous pondre Wall-E). En prenant toutefois le parti de subvertir la figure de l'IA maléfique employée par d'autres classiques tels que Matrix ou Ex Machina, le cinéaste interroge le spectateur sur son rapport à la machine, et surtout son rapport à lui-même.
Attention, spoilers.
- Et puisque l'on parle de Skynet, et s'il était temps de réhabiliter Terminator : Renaissance ?
l'homme dans la lune
D'un point de vue strictement narratif, Moon se répond d'un synopsis plutôt accessible : après plusieurs années ées à rechercher une solution miracle à la crise énergétique terrestre, l'entreprise Lunar Industries est finalement parvenue à découvrir la ressource-clef tant attendue. Son extraction n'étant possible qu'à même la surface de la lune, la société s'empresse d'y construire une station spatiale à la gestion quasi autonome. Aussi, nul besoin d'y envoyer quinze-mille astronautes tous les deux mois pour en assurer la maintenance. En lieu et place d’une main d’oeuvre couteuse, l’emploi d’un seul et unique employé – lequel officie à temps plein au sein de la base pour une durée de trois ans – suffit à assurer le bon fonctionnement de toute la chaîne de production. Le spectateur part ainsi à la rencontre de Sam Bell (qu'interprète très joliment Sam Rockwell), pauvre bougre esseulé du côté obscur de la lune.Le meilleur ami de l'Homme 2.0
the clone wars
Nul besoin d'être fin connaisseur en la matière pour savoir que, comme l'a très bien décrit le critique littéraire Denis Guiot, "la science-fiction n'a pas attendu Dolly pour parler du clonage et s'en inquiéter". Outre les piliers du genre tels que Le Meilleur des mondes d'Aldous Huxley, légion sont les récits à s'être penchés sur la question depuis. Si les exemples ne manquent pas, on peut notamment citer Le Prestige (l'un des meilleurs films de Christopher Nolan, inutile de chercher contre-argumenter), The Double de Richard Ayoade (dont le récit est tiré de la nouvelle homonyme de Fyodor Dostoevsky), Oblivion, Cloud Atlas, ou bien entendu, la franchise Blade Runner impulsée par Philip K. Dick en 1968. La figure du clone appartient donc à ces poncifs que le genre a longuement éculés tout en y projetant pléthore de dilemmes éthiques, moraux, politiques, philosophiques et plus encore. Mais loin de chercher à battre les mêmes cartes ad nauseam, Duncan Jones s'en sert davantage comme prétexte que de finalité. .
le meilleur des mondes
Le fait est que le film ne figure aucun "humain" à proprement parler. Pourtant, le cinéaste insiste lourdement : l’absence d’humains n’implique pas l’absence d’humanité, ce que GERTY ne manque pas d'illustrer. Initialement présenté au spectateur comme l'archétype de la machine (soit, une boîte de conserve à laquelle déléguer sans trop d'états d'âme les tâches ingrates du quotidien), l'appareil manifeste bien rapidement une ambiguïté singulière. Le clin d’oeil est difficile à ne pas relever, mais au cas où certains auraient manqué le mémo, le robot n'est pas sans rappeler une autre intelligence artificielle bien connue du 7e Art... à cela près que GERTY semble avoir été pensé comme le contrepoint de son homologue métallique.
Si Hal et GERTY partagent effectivement quelques attributs visuels, ce dernier a néanmoins été programmé en soutien aux Sam. Certes, le robot omet initialement d'informer le personnage quant à sa véritable nature ; mais ce silence ne serait-il pas finalement la preuve que le robot se plie diligemment à la tâche ? Par souci de clarté, formulons cela autrement : et si demain, votre fidèle Macbook Pro vous apprenait entre deux mails que vous n'êtes qu'un clone condamné à ne jamais sortir de votre open space ? Merci, mais non merci.
Savons-nous réellement à quand remontent les premières traces de civilisation ? Les débats que sous-tendent la question ont beau être perpétuellement disputés, l'anthropologue Margaret Mead argue pour sa part avoir résolu ce problème. À en croire son étude, inutile de chercher pareille preuve aux creux d'anciens pots en terre cuite, mais à la cicatrisation d'un fémur fracturé. Comme le rapporte Le média du CDJ : « Dans le règne animal, si tu te casses la jambe, tu meurs. [...] Aucun animal ne survit à une jambe cassée assez longtemps pour que l’os guérisse. Un fémur cassé qui est guéri est la preuve que quelqu’un a pris le temps d’être avec celui qui est tombé, a bandé sa blessure, l’a emmené dans un endroit sûr et l’a aidé à se remettre [...]. Aider quelqu’un d’autre dans les difficultés est le point où la civilisation commence ».
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Un de mes films préférés, avec un Sam Rockwell parfait comme toujours.
Mais il peut y avoir plusieurs interprétations.
Des clones, oui.
Mais pourquoi pas un homme bouffé par la solitude, et victime d’hallucinations qui lui font voir ses doubles partout.
Doubles inventés qui, au final, lui permettraient de quitter le navire sans trop de remords.
Je me pose toujours la question en revoyant le film, et j’aime ces deux idées.
Très bon film de SF. Il m’a fait penser à l’univers de l’écrivain Issac ASIMOV.
Petit budget et pourtant l’ambiance est réussie. Ceux qui veulent un film comme I-Robot avec de l’action, ez votre chemin. Ici c’est de la bonne SF !
Au age I-Robot qui est censé reprendre Les Robots d’Issac Asimov, n’a rien avoir avec les bouquins, une honte de sortir un navet pareil. Ne rend pas hommage à ce grand écrivain (les 3 lois de la robotique, c’est de lui) Pas de robot-psychologue (Susan Calvin) Et oui une psychologue pour les robots. Pour ceux qui ne connaissent pas Issac Asimov, foncer (j’ai commencé par ‘un défilé de robots », un recueil de nouvelles mais il y en a un autre avant : les robots que je n’ai pas encore lu d’ailleurs. Pour les enfants qui n’aiment pas trop lire, un recueil de nouvelles c’est parfait
Superbe film d’anticipation, découvert par hasard.
La BO est top.
Découvert à sa sortie (en DTV chez nous…) et j’avais été bien accroché! Et il faut parler de la musique de Clint Mansell, une petite pépite!
Bon, du coup, je lance un pavé dans la mare: le synopsis initial du prochain Bong Joon Ho/Robert Pattinson me fait beaucoup penser à Moon meme si je m’attend à quelque chose de différent, hein…
Oui très bon film… en revanche je n’ai pas vu sa suite (ou tout du moins le film censé se dérouler dans le même univers) également réalisé par Duncan Jones et qui s’appelle Mute.
Les critiques assez désastreuses m’avaient vacciné à l’époque
A priori petit film indé de SF qui est assez malin. Et rehaussé par un Sam Rockwell qu’on aimerai voir plus souvent. Certe ce n’est pas un équivalent du Solaris de Tarkovski mais on ne décroche pas et on a bien notre dose de questionnement et de reflexion comme avec un épisode de la quatrième dimension. Le genre de film que me fesait aller au ciné.
Sam Rockwell est un acteur fabuleux. Moon est très bien également.
Dommage qu’on ne le voie pas dans de meilleurs film. Il est l’un de mes acteurs préférés malgré pas mal de films pas terribles. Il a toujours été impec
Je me suis calé devant avec un a priori très positif ( le fils de David Bowie, pensez donc…) et je n’ai pas été déçu.
Peut-être pas un grand film mais de la bonne SF intelligente. Que demander de plus
Bon souvenir de ce film, merci pour l’article !
Vraiment excellent ce film. Sam Rockwell est parfait. C..est devenu un classique de la SF pour moi.