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The Promised Neverland : la fin tout en délicatesse de ce manga hors norme

Par Flavien Appavou
2 juin 2021
MAJ : 21 mai 2024

The Promised Neverland se finit avec ce 20ᵉ et dernier tome. Et quel dernier tome… ! Un dossier avec un peu de spoil pour ceux qui ne l’ont pas encore lu.

The Promised Neverland : Couverture Tome 20, Kaiu Shirai, Posuka Demizu

Après quatre ans de publication au Japon, et cinq ans en , la série The Promised Neverland s’achève chez Kazé manga avec ce 20e tome. Une fin émouvante, douce et amère qui tient toutes ses promesses.

On commence déjà à mettre des warnings pour ce dossier, il contiendra pas mal de spoilers sur la série. Pour ceux qui n’ont pas lu The Promised Neverland, un autre dossier existe et vante tous les mérites de ce manga. 

Mais pour résumer rapidement les 20 tomes (qu’il faut découvrir et lire, on ne le répètera jamais assez), on suit les aventures des pensionnaires de Grace Field House, une joyeuse résidence pour enfant qui se trouve être un garde-manger pour démon. Emma, Ray et Norman, les principaux protagonistes de l’histoire vont créer un plan pour s’échapper de ce pensionnat. Mais Norman se fera livrer aux démons pour être entretenu et possiblement être mangé un peu plus tard.

Pendant ce temps, Emma, Ray et leurs sœurs et frères vont s’échapper de Grace Field House et vagabonder dans le monde des démons à la recherche de William Minerva, un homme étrange qui pourrait leur permettre de redre un monde peuplé d’humains.

 

Couverture Tome 12, Kaiu Shirai, Posuka DemizuYAKUSOKU NO NEVERLAND © 2016 by Kaiu Shirai, Posuka Demizu/SHUEISHA Inc.

 

Dans leur recherche, ils vont tomber sur deux sympathiques démons appelés Sonju et Mujika, qui ne mangent pas de viande, enfin pas d’enfants humains. Ils découvrent ainsi que les démons mangent des humains pour éviter une dégénérescence, mais ces deux-là sont immunisés grâce au sang de Mujika qui a le pouvoir d’éviter toute déconvenue si les démons n’ingurgitent pas de viande. Petit à petit, les enfants vont aussi découvrir que les humains et les démons se sont fait une promesse, il y a mille ans, séparant le monde des humains et des démons en deux. Sauf qu’un clan, celui de Ratri (à l’origine de cette promesse), assure toujours la subsistance des démons grâce à l’approvisionnement en enfants et en humain des fermes qu’ils contrôlent.

C’est donc dans la joie et la bonne humeur que les enfants se trouvent des alliés et affrontent des démons surpuissants en tentant de survivre et, pourquoi pas, de réaliser une nouvelle promesse leur permettant de vivre enfin heureux. Dans leur quête, ils vont aussi s’apercevoir que dans le monde des démons, tout n’est pas si noir que ça. Un problème moral s’impose donc pour nos héros. Est-ce qu’il faut éradiquer tous les démons, vivre avec en espérant ne pas se faire manger ou trouver une autre voie ? C’est en répondant à toutes ces questions que The Promised Neverland se termine.

 

Illustration Tome 1, Kaiu Shirai, Posuka DemizuPrison Break version ado et démon

YAKUSOKU NO NEVERLAND © 2016 by Kaiu Shirai, Posuka Demizu/SHUEISHA Inc.

 

La fin de la traque

Dès les premières pages, Kaiu Shirai, le scénariste, savait où il amenait ses lecteurs. Il avait rédigé toute la trame narrative en focalisant son manga sur l’histoire au lieu des personnages. Il avait aussi déjà l’idée d’une héroïne forte pour trancher avec ce qui se faisait déjà. Un fait assez rare dans le Shonen Jump de la SHUEISHA que son éditeur Suguru Sugita s’est empressé de valider. Le titre ayant du potentiel rien qu’à son histoire, il ne manquait plus qu’un dessin marquant, léger avec beaucoup de profondeur et très iconique.

Il n’en fallait pas plus pour que l’excellente dessinatrice Posuka Demizu s’impose aux deux compères. Le titre a pu sortir de l’ombre en devenant aussi sombre qu’un thriller et aussi lumineux qu’un shonen manga. Tout en montrant un trio hors du commun et une héroïne volontaire et courageuse ne perdant pas espoir face à l’immensité de la tâche.

 

Double Page, Kaiu Shirai, Posuka DemizuOptimisme à toute épreuve

YAKUSOKU NO NEVERLAND © 2016 by Kaiu Shirai, Posuka Demizu/SHUEISHA Inc.

 

Ce manga, qui a des allures de Prison Break pour son premier arc, montre tout le génie des auteurs/autrices. L’équipe et leur éditeur excellent dans le suspense et les fins de chapitre en cliffhanger. On est tour à tour, surpris, frustré, dubitatif et pris par l’enjeu que vivent les enfants. L’histoire devient plus ionnante au fur et à mesure des pages, tant la traque est surprenante (dans tous les sens du terme). Les pions se mettent en place dans un échiquier géant que seuls les créateurs savent où sont les coups gagnants. Les personnages et les lecteurs sont pris dans ce jeu mental pour un final de toute beauté. 

Les arcs de The Promised Neverland apportent tous des moments forts en émotions, aussi bien dans les actions que dans les tragédies. Oui, car pour une fois les personnages meurent vraiment et ne sont pas ressuscités miraculeusement. Ce qui apporte encore plus de profondeur dans l’expérience des enfants. On s’émeut aussi bien pour les protagonistes que pour les antagonistes. Les histoires sont tellement bien ficelées et les émotions sont retranscrites avec une telle justesse, que le lecteur est tiraillé par ses propres émotions contradictoires.

Avec sa construction, ce manga se déguste, car chaque détail compte. Le scénariste s’amuse même à nous faire partir en quête des petits détails dans les rabats des jaquettes de couverture. Une fois la lecture des 20 tomes finie, le puzzle est presque complet. Mais une réflexion intérieure demeure. Est-ce que ce manga n’apporte pas une autre réflexion sur le monde qui nous entoure ?

 

Double Planche, Kaiu Shirai, Posuka DemizuOui sur toi !

YAKUSOKU NO NEVERLAND © 2016 by Kaiu Shirai, Posuka Demizu/SHUEISHA Inc.

 

Surconsommation de masse

Le thème principal du manga n’est pas forcément le déement de soi, la quête d’identité ou autre valeur personnelle qu’on pourrait retrouver dans un shonen classique, mais bien l’élevage et la consommation de viande, et ici d’humains. À travers les différents arcs de l’histoire, qui ent par l’évasion, puis la recherche d’un Eden, la partie de chasse, la quête d’un nouvel avenir et enfin par le renversement des valeurs, The Promised Neverland dépeint chaque fois les modes de consommation des humains et aussi des démons.

Car comme dit précédemment, pour les démons, il est « nécessaire » de se nourrir de viande au point que s’ils n’en mangent pas, ils redeviennent des bêtes sauvages. Ce qui devient aussi une manne pour les dirigeants qui voient dans cette production un intérêt pécuniaire et surtout gustatif. Du coup, on élève en batterie des humains d’une qualité moindre que l’on donne à la plèbe et on garde les meilleurs pour les plus aisés. Le parallèle avec notre monde est tout trouvé.

 

Planche Tome 18, Kaiu Shirai, Posuka DemizuPas de pénurie de nourriture

YAKUSOKU NO NEVERLAND © 2016 by Kaiu Shirai, Posuka Demizu/SHUEISHA Inc.

 

Ce qu’il est intéressant de relever, c’est que même dans le monde des démons, des personnes s’insurgent contre le système. Et donc finalement mis au rebut pour outrage. Et lorsqu’une nouvelle solution apparaît, celle-ci est effacée de la circulation, car le poids économique et les intérêts financiers de cette filière priment sur le reste. Il n’y a pas de consensus possible.

En effet, l’élevage des enfants de qualité prémium, ainsi que les fermes d’élevage en mode intensif sont un reflet de notre société de consommation. Sans non plus promouvoir l’arrêt total de consommation de viande, mais de réfléchir à de nouveaux modes de consommation. Pendant toute la série, on voit comment une mini-société, ici les enfants qui se cachent, s’auto-alimentent, en faisant eux-mêmes leurs propres cultures et en prenant de la viande ou du poisson de manière raisonnée pour devenir totalement auto-suffisant. Au-delà de la survie et de la recherche d’un paradis The Promised Neverland est donc surtout un manga à message.

 

Planche Tome 18, Kaiu Shirai, Posuka DemizuTout casser pour tout reconstruire

YAKUSOKU NO NEVERLAND © 2016 by Kaiu Shirai, Posuka Demizu/SHUEISHA Inc.

 

Un manga à message

En pointant du doigt la consommation de masse, via la survie aussi bien du côté démon que du côté humain, ce manga devient le vecteur d’un profond questionnement lié aux changements de notre époque. Et qui dit changement, dit aussi peur, doute, incompréhension et bouleversement des cultures. C’est ce que met encore plus en valeur le dernier tome de cette série. Pendant plus de 230 pages, les deux auteurs/autrices jouent avec les messages et le changement de paradigme. Sans être trop moralisateur, on retrouve ce qui fait la veine d’un manga shonen : le courage, l’entraide, l’amitié, le déement de soi. Mais ici, on va encore plus loin dans ces messages.

Pour survivre dans ce monde, il faut avant tout le comprendre et se parler. C’est ce que font Emma et Ray ainsi que les autres de Grace Field House. Ils décortiquent le monde avec leurs yeux d’enfants, pour apprendre et comprendre tous les rouages du système pour trouver une solution qui ne sera pas parfaite, mais équitable. Tandis que Norman, assujetti à sa propre peur, aura surtout envie de défendre ce qu’il semble juste, et donc, par extension, faire justice. Petit à petit, la compréhension de ce monde via Emma et Ray vient nous cueillir pour nous délivrer des messages de tolérance et de paix, ce qui fera exploser les peurs de Norman et donc nos peurs.

 

Planche Tome 20, Kaiu Shirai, Posuka DemizuVaincre tout en discutant

YAKUSOKU NO NEVERLAND © 2016 by Kaiu Shirai, Posuka Demizu/SHUEISHA Inc.

 

Avec d’autres messages comme le vivre ensemble, The Promised Neverland touche encore juste dans les principes moraux d’une société. En enlevant la peur de l’inconnu et promouvant l’idée le comprendre sans imposer quoi que ce soit, les enfants touchent directement le cœur des gens. Même si les principaux antagonistes ont une fin funeste, ils redeviennent humains à la dernière seconde en ayant touché du doigt la rédemption qu’ils attendaient tant : une vie normale exempte de toute différence de classe.

Ce manga est une ode à l’humanité en prenant en compte tous les aspects qu’ils soient mauvais ou bons ; ou en essayant de changer leur monde pour un monde meilleur, peut-être un neverland. Dans tous les cas, celui-ci est construit lui-même par les enfants qui deviennent eux-mêmes des acteurs de leur propre vie tout en acceptant et en écoutant les autres. Une belle leçon, voire une belle promesse.

 

Planche tome 20, Kaiu Shirai, Posuka DemizuLeçon de vie

YAKUSOKU NO NEVERLAND © 2016 by Kaiu Shirai, Posuka Demizu/SHUEISHA Inc.

 

Promesse tenue

Si on revient sur le titre de l’histoire The Promised Neverland, le manga tourne autour de la notion de promesse. Aussi bien dans l’histoire, avec la promesse tenue il y a mille ans de non-agression des démons envers les humains, avec en contrepartie de fournir des humains en bétails, et la toute dernière promesse d’Emma. Mais une autre promesse est tenue, c’est celle des auteurs/autrices avec le lecteur. En nous tenant en haleine pendant 20 tomes, cette promesse a donc été bien remplie. La contrepartie est que maintenant la série est terminée en répondant à toutes les questions posées. Il ne nous reste plus qu’à trouver toutes les solutions aux énigmes posées par Kaiu Shirai, le scénariste.

Mais ça ne s’arrête pas là, les deux auteurs/autrices continuent de travailler sur l’univers de The Promised Neverland en sortant des petits one-shots sur les personnages. Ils permettent de mieux connaitre chacun des héros et d’être encore plus en empathie avec eux. Un peu comme si on voyait les coulisses de leur vie à Grace Field House ou pour Norman dans une des fermes Lambda. C’est toujours aussi palpitant et bien dessiné.

 

Planche Tome 20, Kaiu Shirai, Posuka DemizuTadaima

YAKUSOKU NO NEVERLAND © 2016 by Kaiu Shirai, Posuka Demizu/SHUEISHA Inc.

 

Autre promesse tenue par le manga, c’est celle de nous émouvoir. À ce niveau, les derniers chapitres sont d’une émotion folle. Impossible de ne pas tirer une larme devant ce qu’il se e. Les émotions sont si bien retranscrites en écrit et en dessin (d’ailleurs chapeau au traducteur Sylvain Chollet) que votre cœur ne tiendra pas une seconde. On e du rire aux larmes en un clin d’œil. C’est poétique et tragique en même temps. Même sur le dernier chapitre, ils nous tiennent toujours par les mêmes émotions, un mélange d’injustice et de joie. Avec cette dernière bataille contre le destin, qui résout le manga. 

 

Couverture Tome 20, Kaiu Shirai, Posuka DemizuYAKUSOKU NO NEVERLAND © 2016 by Kaiu Shirai, Posuka Demizu/SHUEISHA Inc.

 

La fin de celui-ci n’est pas forcément tout rose et c’est aussi ce que le lecteur attend. Même si des morts réapparaissent par enchantement, la contrepartie est assez rude derrière. Tout n’est ni blanc ni noir, c’est en demi-teinte. Et c’est aussi à notre sens une parfaite conclusion pour ce manga qui tient vraiment toutes ses promesses.

C’est donc une série en 20 tomes chez Kazé manga qui se conclue en apportant son lot de messages et une vision du monde qui questionne. Le titre continue en animé, mais celle-ci n’est pas tellement au rendez-vous par rapport au manga. En tout cas, The Promised Neverland est une série hors du commun qui bouscule les codes et qui fait du bien. Chapeau les artistes.

Ceci est un article publié dans le cadre d’un partenariat. Mais c’est quoi un partenariat Ecran Large ?

 

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RuG
RuG
il y a 3 années

La fin d’un CHEF-D’ŒUVRE !

Tipuncher
Tipuncher
il y a 4 années

Par contre l’animé wtf!!!

EmmaPromised
EmmaPromised
il y a 4 années

Ça tire à la ligne sur les derniers volumes quand même tout en voulant accélérer l’intrigue.
Un peu comme GOT quoi.