Avec Hugh Grant le nouveau prince charmant du grand écran.
Que l'on soit sentimental un peu, beaucoup, ionnément, à la folie ou pas du tout, un constat s'impose : les grandes heures de la comédie romantique ont presque toujours sonné outre-Atlantique. Les exemples ne manquent pas : Billy Wilder, Ernst Lubitsch, Blake Edwards et d'autres ont tous contribué à l'excellence de la rom-com américaine. Un ascendant qui ne s'est jamais démenti, du moins jusqu'à la fin des années 1980 et la sortie du culte Quand Harry rencontre Sally de Rob Reiner. La décennie suivante, le Royaume-Uni vient à son tour peser dans la balance avec 4 mariages & 1 enterrement.
Encore inconnu au bataillon, si ce n'est pour avoir créé le personnage de Mr Bean, Mike Newell choisit le plus jeune Hugh Grant sur plus d'une cinquantaine de candidats. Une chance inouïe pour le comédien qui e alors de l'anonymat à la consécration.
César du meilleur film étranger en 1995, le long-métrage connaît un succès phénoménal au box-office international (avec un budget de 4,4 millions de dollars, il en récolte 245 millions). Et si au-delà d'avoir touché le jackpot, 4 mariages & 1 enterrement avait offert le meilleur pas de côté possible à la comédie british ?
Pas le temps de lambiner, ça va commencer !
UNE CÉRÉMONIE SANS FIN
Qui a dit que l'avenir appartenait à ceux qui se lèvent tôt ? Sûrement pas Charles (Hugh Grant) et sa colocataire Scarlett (Charlotte Coleman), incapables de s'arracher du lit alors qu'ils sont attendus au mariage de leurs proches. Heureusement, même au péril de leur vie, ils savent rattraper leur retard. C'est ainsi que Charles, en sa qualité de témoin du marié, rencontre Carrie (Andie MacDowell), une Américaine de age avec qui il va avoir une trop courte idylle. Et puis, trois mois plus tard, voilà que le schéma se répète avec un nouveau mariage à célébrer et Carrie, de retour, mais désormais en couple.
Le titre programmatique du film fait évidemment sens à cet instant, le spectateur pouvant dès lors s'am à anticiper l'évolution possible de Charles et ses acolytes d'une cérémonie à l'autre. On peut alors penser à Un Jour sans fin, également avec Andie MacDowell, à la différence que les personnages de 4 mariages & 1 enterrement ne revivent pas les mêmes évènements en boucle. Ici, seul le rituel du mariage suffit à rendre la situation aussitôt familière, entre l'échange des consentements à l'église, la garden-party censée ouvrir l'appétit et la soirée dansante un peu trop arrosée.
Oui, Mr Bean est venu er une tête. Amen !
Les récurrences esthétiques participent de ce rapport cyclique. Que ce soit le chapitrage sous forme de faire-part ou bien les plans sur le réveil-matin de Charles, on se sent en terrain connu en permanence, d'où une vraie jubilation lorsque les choses se mettent à déraper. Mais grâce à ce dispositif, le film réussit surtout à englober une période de vie charnière pour les personnages et à révéler toutes les nuances de leur personnalité à mesure que le temps e, plusieurs mois s'écoulant parfois entre deux cérémonies.
Comme annoncé dans le titre, le fameux enterrement n'est pas seulement un moyen d'injecter du drame là où présidait la légèreté, mais de rappeler que rien n'est jamais permanent. Un pied de nez cruel à l'attention des protagonistes qui se pensaient à l'abri des grandes tragédies de l'existence en se raccrochant aux valeurs du mariage. "Peut-être qu'à force d'attendre l'amour de sa vie, on le perd", réalise Charles à cette occasion. En ce sens, le dispositif mis en place par le film agit comme un parfait rite initiatique, de l'insouciance des débuts à la nécessaire prise de conscience.
On ne change pas une équipe chic et choc
L'IRRÉVÉRENCE S'INVITE
Sans que ce soit forcément une preuve de modernité, 4 mariages & 1 enterrement écope aux États-Unis de la classification "R" (interdit aux mineurs de 17 ans et moins non accompagnés d'un adulte) par le comité de censure MPAA. Si d'autres comédies british matinées de romance, comme Un poisson nommé Wanda, en avaient déjà fait les frais, cette aura de film poil à gratter est loin d'être usurpée dans ce cas-ci, Richard Curtis prenant un malin plaisir à égratigner le vernis de la société anglaise, d'ordinaire plus corsetée.
Grâce à un rythme de montage acéré, annonçant sur un mode mineur les expérimentations débridées de Danny Boyle (autre cinéaste anglais avec lequel Curtis collaborera pour Yesterday), le long-métrage bouscule la dynamique habituelle de la rom-com. Et cela se manifeste par exemple via les séquences introductives des deux premiers chapitres, quand Charles et Scarlett tentent d'arriver à temps à l'église. Le surdécoupage est alors favorisé afin de bringuebaler les personnages en tout sens et créer des effets de dissonance, notamment par le biais de changements subits de valeurs de plans et d'ambiances sonores.
Cheveux soyeux, sourires ultra-bright... la classe anglaise !
L'écriture n'est pas en reste, bien entendu. Curtis peaufine des dialogues aux petits oignons, surtout lorsqu'il s'agit des répliques cinglantes de Fiona (Kristin Scott Thomas, parfaite en mégère). "Tu crois que je le détesterais moins s'il n'était pas mon frère", l'entend-on se lamenter, et ce n'est qu'un exemple parmi d'autres. La palme du fou rire revient néanmoins au prêtre Gerald (Rowan Atkinson, alias Mr. Bean), multipliant les lapsus alors qu'il istre les sacrements du mariage et demandant aux époux de répéter après lui. "Moi, Bernard (…) je prends Lydia (…) pour pelouse légitime", dit-il avec un aplomb qui défie toute concurrence.
Mais le politiquement incorrect vient surtout du décalage entre un registre de langage relativement soutenu et des familiarités du type "Putain !", exclamées comme un réflexe pavlovien. Et si, là encore, on ne parle pas de révolution, l'expérience amoureuse et sexuelle de Carrie, qui tient de la petite prouesse technique (il faut la voir énumérer ses conquêtes pendant presque cinq minutes), renvoie à une vision des relations intimes sans tabous. Pour autant, le film ne tombe jamais dans le discours graveleux ou la provocation gratuite et s'en remet toujours au charme naïf de son comédien vedette.
Rendons grâce à Andie, parce qu'elle le vaut bien
AMOUR & COMMENTAIRES
Avec un matériau autobiographique revendiqué par Curtis, qui s'était rendu à 72 mariages en l'espace de seulement 10 ans, le film décortique à travers Charles, l'alter ego fictif du scénariste, le profil type du Don Juan maladroit, dans l'auto-analyse constante vis-à-vis de ses propres faits et gestes. Un rôle dont Hugh Grant aura du mal à se défaire et qui fera sa renommée au fil des années, de la même façon que Curtis continuera de décliner ce personnage tout au long de sa carrière jusqu'au plus récent Il était temps (son meilleur opus à date ?).
"Le sentiment d'inutilité et de doute qui assaille Charles est probablement très proche de celui éprouvé depuis toujours par beaucoup d'hommes", racontait le scénariste dans une interview accordée au journal The Guardian en 2020. Des propos tenus suite à un sondage national coorganisé par le British Film Institute et Google Pixel, établissant 4 mariages & 1 enterrement comme le film anglais que les Britanniques aiment revoir le plus souvent, devant Skyfall et Harry Potter et le Prisonnier d'Azkaban.
Il y a des jours avec et des jours sans
Moins dans la névrose ou le monologue intérieur façon Woody Allen à l'époque d'Annie Hall, le héros compense avant tout son embarras par l'autodérision. Une distance ironique qui le rend d'abord très attachant et lui donne ensuite à incarner une forme de séduction post-moderne (oui, le mot est lâché), à travers laquelle la spontanéité du cœur se heurterait sans cesse à la conscience aiguë des clichés amoureux véhiculés en littérature, au cinéma ou dans toute autre représentation artistique du réel. À ce titre, quand Charles déclare sa flamme à Carrie, il cite une réplique d'un des protagonistes de la sitcom La Famille Partridge, une manière de se donner du courage via la référence.
Il est ainsi très pertinent d'avoir fait de Carrie un personnage en tous points opposé ou presque. Là où Charles intellectualise les choses, elle suit son instinct, fidèle à son caractère de femme forte et entreprenante. Cette dissemblance est le grand intérêt de leur relation, tous deux cherchant à s'apprivoiser, à se raccorder scène après scène, et permet également au film d'éviter le pathos et la sensiblerie. La demande de non-mariage finale, sous une pluie battante, est l'exemple parfait de l'inversion des codes de la rom-com. On conserve littéralement l'imagerie de l'orage et du coup de foudre (éclair dans le ciel à l'appui) tout en détournant la sacro-sainte conclusion du genre.
Ils ne se marièrent pas, mais vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants
Au-delà du simple postulat romantique, 4 mariages & 1 enterrement tire donc son épingle du jeu grâce à une approche plus audacieuse et impertinente que la moyenne. Si Mike Newell tient correctement la barre derrière la caméra, c'est Richard Curtis au scénario qui affiche un vrai talent pour la comédie romantique, sans compter la révélation Hugh Grant. En 2019, une série adaptée du film par Mindy Kaling voit le jour en même temps qu'une mini-suite tournée avec le casting original à l'occasion du Red Nose Day (journée de lutte contre la pauvreté au Royaume-Uni). Preuve s'il en est que 4 mariages & 1 enterrement reste un indémodable.
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Un très grand film pour ma part. Le discours de John Hannah à l’église me fait pleurer à chaque fois. Et pis le crush Andie! Culte.
Les 3 plus grandes comédies romantiques me concernant sont et je serais incapable de les départager : Quand Harry rencontre Sally, Coup de foudre à Notting Hill & 4 mariages et un enterrement.
J’ai une préférence pour « Coup de foudre à Notting Hill », personnellement.
Au même titre que les Audrey Hepburn
plus grande comédie romantique … exæquo avec « Quand Harry rencontre Sally »
Comme quoi un bon scénar fait plus facilement un bon film
à regarder au moment de la fin de la fin du monde connu juste avant le blackout.
Et ce n’est pas seulement le meilleur film de la galaxie, c’est celui de tous les univers possibles.
Le casting est parfait.
L’histoire est parfaite.
Tout y est parfait.
Un film que je me lasse jamais de revoir. Un beau souvenir en salle où je n’attendais rien de particulier de cette comédie d’outre manche qui m’a fait franchement rire et er une séance qui restera parmi les plus agréables en salle. Et Hugh Grant est juste parfait et indétronable dans ce registre comique.